Le Lynx de Silvia Avallone
Piero, 39 ans, bel homme, grand, toujours impeccable, uniquement vêtu en Dolce & Gabbana, est un voleur invétéré, surtout de belles voitures. Peu lui importe d'être passé plusieurs fois par la case prison, il en est toujours ressorti. Voler lui procure d'intenses poussées d'adrénaline, lui donne un sentiment de puissance et d'agilité, tel le lynx.
Voler lui permet de fuir une épouse résignée, Maria, 38 ans, enlaidie, apathique "comme une poupée vieillie sous cloche". Voler l'aide à tenir à distance des souvenirs d'enfance douloureux. Par une nuit de brouillard, glaciale, à une heure du matin, quelque part dans le Piémont, Piero gare son Alfa Romeo rutilante, volée évidemment, sur une aire de repos et pénètre dans le restoroute avec la ferme intention de commettre un de ces braquages expéditifs dont il a le secret. Alors qu'il se croit seul avec la caissière, inquiète, l'escroc découvre dans les toilettes un adolescent paumé et dépenaillé, blond, au visage couvert de piercings, dont le mutisme et l'étrange beauté le troublent. Comprenant que ce dernier cherche une voiture, Piero décide de changer ses plans et lui propose de le raccompagner. Mais voici que lui, "le dur", est touché par la gratitude de ce garçon insaisissable et va chercher à le revoir dès le lendemain. S'ouvre alors une parenthèse de deux mois qui marquera un tournant irrémédiable dans la vie de celui qui se considérait comme un "vrai mec"... Poignant de bout en bout, ce court récit paru dans le Corriere della Sera, inédit en français, confirme le talent très prometteur de Silvia Avallone.